A l’occasion de la sortie DVD du film Le garçon et le héron d’Hayao Miyazaki et le studio Ghibli, la bibliothèque vous présente une table thématique (DVD et livres) à retrouver à l’espace audiovisuel.
« Je soulève le couvercle de mon esprit. » Hayao Miyazaki
Synopsis
La destinée tragique de la vie humaine apparaît dans les premières minutes avec la destruction de l’hôpital où la mère de Mahito Maki était en soins, clin d’œil au Tombeau des lucioles (1988). Mahito Maki doit faire face à cette interruption brutale dans sa vie et, l’année suivant, suivre son père qu’il l’amène à la campagne auprès de sa seconde épouse. Cette dernière n’est autre que sa tante maternelle. Et déjà elle est enceinte. Changement que Mahito n’approuve pas.
Mahito Maki s’isole dans ce nouvel environnement mais un héron cendré vient à sa rencontre pour le propulser dans un univers parallèle où demeure son grand-oncle. Celui-ci souhaite qu’il lui succède mais Mahito Maki est confronté à une série d’épreuves qu’il vit dans ce monde onirique et qui le poussent s’interroger sur son devenir. Peut-on réinventer le réel pour y vivre ou fuir les contraintes qu’il engendre sur les vies humaines ?
Présentation de l’œuvre
Douzième long métrage du réalisateur japonais Hayao Miyazaki (05.01.1941-…), le film d’animation reprend le titre de l’ouvrage Et vous, comment vivrez-vous ? (1937) de Genzaburō Yoshino mais il s’inspire, en fait, du roman Le Livre des choses perdues (2016) de John Connolly.
En septembre 2013, Hayao Miyazaki avait annoncé sa retraite au cours d’une conférence de presse. Cependant, il a trouvé le temps long. L’occasion de se remettre au travail se présenta à l’instigation de la coloriste Michiyo Yasuda (28.04.1939–05.10.2016) qui lui demanda de faire un dernier film. La mort de son collaborateur et ami Isao Takahata – alias Pak-san – le 5 avril 2018 le bouleversa et a hanté ses nuits comme il le révéla à un journaliste new-yorkais qui l’interrogeait sur ses rêves.
Dans le documentaire « Hayao Miyazaki et le héron » (2024) sorti le 21.11.2024 en salles, le réalisateur japonais explique qu’il a retranscrit son environnement familier dans sa dernière œuvre. Il y tient le rôle de Mahito ; Pak-san, celui du grand-oncle ; le producteur du studio Toshio Suzuki, celui du héron cendré escroc ; Michiyo Yasuda, celui de Kiriko, et son assistante, celle de Natsuko.
Miya-san s’y dévoile, depuis sa jeunesse repliée sur lui-même à ses obsessions contemporaines, notamment les repères poreux entre le réel et le rêve, ses réflexions sur la malveillance du monde et la limite de ses propres ressources avec la vieillesse qui le prive progressivement de ses collaborateurs. Son perfectionnisme autant dans l’écriture du storyboard que dans la réalisation le conduit à un épuisement certain et à atteindre ses limites qu’il exprime par des propos récurrents : « Je crois que mon cerveau est cassé. » et « Je suis allé à la limite de la folie. »
Les thématiques chères à Miayazaki sont présentes comme l’enfance et l’humanisme qui pousse grandir à travers Mahito et Himi, mais aussi la guerre et les destructions qui s’en suivent dès le début du film, le monde militarisé des perruches et l’activité industrielle de l’usine de Shôichi, le père de Mahito. La religion apparaît à travers la tombe et les cyprès sur l’île, les Warawara qui préfigurent l’âme des jeunes enfants qui s’en vont rejoindre le monde réel, la météorite animant le monde parallèle et les cailloux que doit configurer le grand-oncle. Quant à l’univers féminin, il est représenté autant par les grands-mères que la tante et nouvelle-mère Natsuko ou encore Kiriko. De même, Himi donne le pendant féminin de Mihito qui accepte de grandir pour lui donner naissance et accepter de mourir.
Par ailleurs, la mort est très présente dans « le Garçon et le héron » avec la sentence « Ceux qui cherchent à comprendre périront » inscrite sur la tombe anonyme qui demeure au centre d’une île, représentation animée des cinq peintures intitulées « L’île des Morts » (1880−1886) d’Arnold Böcklin.
Par la même, son corollaire, le deuil, est donc très présent et Hayao Miyazaki signale que Mahito doit se confrontait à son grand-oncle pour pouvoir avancer et tendre vers la maturité. Pour lui, « rien ne sèche plus vite que les larmes ». Aussi, le personnage ambivalent du héron cendré qui n’est ni un ami ni un compagnon pour Mahito lui donne une leçon de vie en lui clamant que « De toute façon, tu finiras par oublier »,
Durée : 2h05
Oscar du meilleur film d’animation 2024